CHRONIQUES ET ENTRETIENS


2002 2003 2004


Septembre
L'encadrement à distance [1]

Octobre
L'encadrement à distance [2]

Novembre
L'encadrement à distance [3]

Décembre
La conférence électronique (forum), média et situation de communication pédagogique

L'encadrement à distance [1]

L'encadrement est souvent présenté comme une des clés de la réussite d'une action de formation à distance. Si la nécessité d'un dispositif d'encadrement ne fait pas question, il n'en reste pas moins, que celui-ci peut revêtir des formes extrêmement variées. Les choix pédagogiques, l'organisation administrative, les médias utilisés par un organisme de formation à distance sont autant de facteurs qui influencent le cadre théorique et la forme de l'encadrement.

Dans un premier temps, nous nous interrogerons sur la signification du terme même - encadrement - et essayerons de dégager les traits caractéristiques de ses acceptations courantes. Puis, nous examinerons les différentes facettes de l'encadrement en formation à distance. Ainsi, de sa raison d'être, des plans sur lesquels il s'exerce, des différents modèles, des modalités et des stratégies possibles. A partir de ces constats nous établirons une grille d'analyse susceptible de faciliter le travail des concepteurs de systèmes d'encadrement en formation à distance.

Définitions courantes (Petit Larousse illustré, 2000)

Encadrement

1° Ce qui encadre : l'encadrement d'un tableau.
2° Ornement en saillie de certains membres d'architecture.
3° Ensemble des cadres d'une troupe ou d'une entreprise : l'encadrement d'un régiment.
4° Action d'encadrer un groupe, ensemble des personnes qui ont la responsabilité d'un groupe : procéder à l'encadrement des recrues.

Encadrer

1° Mettre dans un cadre.
2° Entourer et faire ressortir : cheveux noirs encadrant le visage.
3° Se tenir de part et d'autre de quelqu'un pour le garder, maintenir un groupe dans certaines limites : " le service d'ordre encadrait la manifestation.
4° Faire entrer dans le cadre d'une formation : encadrer de jeunes recrues.
5° Assurer auprès des personnes, un rôle de direction, de formation.
6° Pourvoir de cadres : troupes bien encadrées.
7° Mettre sous une autorité en constituant un ensemble hiérarchique.

De ces quelques définitions, nous pouvons tirer le constat que l'encadrement et l'action d'encadrer délimitent un espace, que le cadre a parfois une fonction esthétique, qu'il est donc là pour faire ressortir l'espace encadré. Il apparaît que le cadre, c'est notamment le cas pour un tableau, a pour objet de circonscrire et de mettre en valeur. Par son existence même, il modifie la perception de l'espace encadré qu'il isole de l'environnement.

Dans son acceptation anthropomorphique, l'encadrement est un ensemble de personnes qui ont la responsabilité de celles qu'elles dirigent. Il s'agit d'un corps constitué qui détient un pouvoir hiérarchique, en charge de l'organisation et du contrôle du travail des subordonnés.

Ainsi, le cadre exerce ses fonctions sur un continuum allant de la réduction de la liberté de l'encadré par l'exercice de son pouvoir à une démarche plus pédagogique, qui consiste à accueillir et guider le " nouveau " au sein d'une organisation constituée.

Enfin, encadrer, c'est renforcer, par l'affirmation de règles internes et de signes de reconnaissances, l'identité d'un groupe et le sentiment d'appartenance du nouvel arrivant.

Nous retiendrons principalement :

i) que le cadre n'est pas neutre par rapport à l'objet ou la personne qu'il encadre ;

ii) que le cadre détient un pouvoir hiérarchique et organisationnel ;

iii) que le cadre par son action interfère sur la liberté de l'encadré ;

iv) que le cadre peut avoir des objectifs pédagogiques, notamment faciliter la venue et l'intégration de l'encadré au sein d'un groupe.

L'encadrement à distance [2]

Les raisons d'être de l'encadrement

La formation à distance implique une distinction forte entre l'enseignement et l'apprentissage. Les concepteurs d'un cours à distance ont comme objectif de produire un matériel pédagogique qui se suffise à lui-même et que l'ont peut qualifier d'autoportant dans la mesure où il contient, outre la présentation des concepts à acquérir, des activités d'apprentissage permettant à l'apprenant de maîtriser de nouvelles stratégies méthodologiques et d'engager une réflexion métacognitive.

En complément du matériel pédagogique, l'encadrement tutoré, sans préjuger de la forme qu'il peut prendre, est reconnu comme un élément indispensable à une action de formation à distance.

Les principales raisons d'être d'un dispositif d'encadrement sont donc de répondre à des attentes, des besoins, exprimés ou non, par l'apprenant et de lui permettre de surmonter ses difficultés sur les plans administratif et pédagogique. Enfin, l'encadrement devrait également soutenir la motivation de l'apprenant et l'accompagner dans son exercice de l'autonomie.

Rompre l'isolement
Le premier besoin, auquel doit répondre l'encadrement, est de lutter contre l'isolement auquel doit faire face l'apprenant. Cette solitude, directement liée à la distance (géographique, temporelle, sociale etc.), peut être combattue par l'établissement de contacts avec un intermédiaire de l'institution pédagogique (le tuteur). L'objectif de l'encadrement est, ici, de développer un sentiment d'appartenance à une collectivité.

Accompagner
Un des rôles importants du tuteur est d'accompagner l'apprenant lors de son parcours d'apprentissage. Ses interventions qui portent sur différents plans (cognitif, méthodologique, métacognitif, affectif…) constituent une part importante du support à l'apprentissage dont doit bénéficier chaque apprenant. La disponibilité du tuteur et sa capacité d'empathie pour l'apprenant qu'il encadre sont des critères intéressants pour l'évaluation de la qualité de son accompagnement.

Motiver et favoriser la persévérance
Les taux d'abandon d'études en formation à distance sont importants (de 40% à 50% dans les organismes des pays occidentaux). Outre les raisons communes à celles repérées en enseignement en face à face, plusieurs auteurs identifient d'autres causes plus spécifiques à la formation à distance. Parmi elles, certaines relèvent directement de la responsabilité de l'institution pédagogique et de l'encadrement des apprenants. Louise Bourdages (1994) indique que " Kember mentionne… les aspects académiques, [qui] comprennent… le matériel pédagogique, l'interaction entre les membres de l'université et l'étudiant, l'interaction entre le tuteur et l'étudiant, etc. " et que " Tinto conçoit la persistance aux études universitaires comme un processus longitudinal d'interactions entre le système de l'étudiant et les systèmes académiques et social de l'établissement " . Il apparaît donc, que le système d'encadrement adopté pour une formation à distance a un rôle important à jouer pour renforcer la motivation et la persévérance de l'apprenant.

Rendre autonome
De nombreux auteurs et parmi eux, A.-J. Deschênes, précisent le concept d'autonomie et les différents plans sur lesquels elle peut s'exercer. Pour notre part, il nous semble également que " …l'autonomie …est caractérisée par le rapport à autrui sur les plans de la distance et de la dépendance ". Ainsi, c'est de la nature et de la qualité de l'interaction entre le tuteur et l'apprenant que peuvent être dégagés les éléments à partir desquels la capacité d'autonomie de l'apprenant pourra se développer. Le tuteur joue, donc, un rôle majeur dans le développement de l'autonomie de l'apprenant. Trop directif, il ne permettra pas à celui-ci de gagner l'indépendance nécessaire, trop imprécis dans ses réponses, il générera incompréhension et frustration de l'apprenant.

Les différents plans sur lesquels s'exercent l'encadrement

Plan administratif
Lorsqu'un apprenant s'inscrit à une formation à distance, il a, de manière naturelle, de nombreuses interrogations sur le plan administratif : modalités d'inscription (exigence de diplôme, validation des acquis professionnels, dates des sessions, coût...) ; forme de l'enseignement (organisation du cursus, médias utilisés, formes et nature des validations…) ; disponibilité de ressources (nature des contacts avec le responsable du cours et les tuteurs, dialogue avec les pairs, bibliothèque...). Si les institutions pédagogiques offrant des formations à distance produisent des documents répondant aux questions les plus fréquentes des apprenants (comme par exemple la Télé-université avec les fascicules du " Guide " et les cahiers d'études), des études, et l'examen de notre propre expérience, nous montrent que les apprenants adultes réclament des précisions ou un rappel des réponses tout au long de leur parcours d'apprentissage. Il nous semble que cet état de fait est lié à ce que les adultes accordent moins facilement leur confiance que les scolaires à une institution, que leurs objectifs pédagogiques sont plus déterminés et porteurs d'enjeux forts, qu'ils sont conscients que les principes administratifs sont susceptibles d'évolution, qu'ils peuvent soulever par leur questionnement des situations inédites. Sur ce dernier point, nous nous souvenons d'avoir provoqué un débat entre les pôles administratif et pédagogique de la Télé-université à propos de notre participation à une audioconférence d'encadrement programme et de sa prise en charge financière. L'encadrement administratif dans lequel, à notre avis, le tuteur doit jouer, à côté des services administratifs, un rôle circonstancié, est important sur le plan affectif. En effet, l'apprenant qui obtient des réponses rapides et précises est rassuré et mis dans des conditions confortables qui lui permettent de mobiliser son énergie pour la réalisation de ses apprentissages.

Plan pédagogique
Le rôle de l'encadrement pédagogique est de faciliter l'apprentissage des connaissances contenues dans le matériel pédagogique. Il intervient sur les plans cognitif, méthodologique, métacognitif et affectif. C'est le tuteur qui est principalement en charge de cet encadrement même si certaines institutions comme la Télé-université propose également un encadrement programme. Ses objectifs sont d'aider l'apprenant en difficulté, d'enrichir sa démarche d'auto-apprentissage, de procéder aux rétroactions des évaluations. Afin d'encourager l'autonomie de l'apprenant, cet encadrement, hormis les rétroactions, doit être facultatif. Ainsi, si l'institution et le tuteur sont dans leurs rôles lorsqu'ils proposent ou suggèrent des activités d'encadrement, l'initiative de leur réalisation doit rester à l'apprenant.

A titre d'exemples nous évoquerons quelques situations d'encadrement types. Sur le plan cognitif, l'apprenant demande fréquemment de nombreuses précisions ou compléments d'information sur les connaissances abordées par le cours. Le support dont il bénéficie prend généralement la forme d'un dialogue asynchrone où le tuteur doit prendre soin de contextualiser et d'individualiser ses contributions et de proposer d'accéder à des ressources complémentaires. Sur le plan méthodologique, le tuteur donne des indications qui permettent à l'apprenant de mieux maîtriser certaines stratégies d'apprentissage. En particulier, sur la manière d'aborder la rédaction d'un travail noté mais également pour améliorer ses stratégies de lecture et d'étude à partir de différents médias (par exemple, le rôle des vidéocassettes ou bien encore la manière de préparer sa participation à une audioconférence). Sur le plan métacognitif, le tuteur doit encourager l'apprenant à prendre du recul et à procéder à des auto-évaluations. De plus, les échanges par messagerie électronique, de par leur caractère asynchrone, sont l'occasion d'approfondir sa réflexion sur les façons de vivre et d'intervenir sur son processus d'apprentissage. Sur le plan affectif, la capacité d'empathie du tuteur est primordiale. Elle se traduit par l'emploi de mots justes, au bon moment, notamment lorsque l'apprenant rencontre des difficultés d'ordre plus personnel sans lien direct avec la formation mais qui influent sur son déroulement.

BOURDAGES, Louise (1994). La persistance aux études universitaires en formation à distance, le défi de la distance ou celui du sens ?
DESCHENES, André-Jacques (1991). Autonomie et enseignement à distance.

 

L'encadrement à distance [3]

Les différents modèles d'encadrement en formation à distance

Définition d'un modèle
Un modèle est une représentation simplifiée, sous forme de schéma par exemple, où sont identifiés les différents éléments qui le constituent, précisées les interactions entre ces éléments et décrits les résultats obtenus.
Un modèle est dit " descriptif " lorsqu'il décrit une situation existante et " prescriptif " lorsqu'il représente " une solution idéale ".
Les modèles d'encadrement dépendent directement des modèles pédagogiques eux mêmes influencés par les théories pédagogiques et en amont les théories psychologiques.

Nous évoquerons ci-après deux modèles d'encadrement inspirés des théories académiques et psychocognitive.

Le modèle académique
Le modèle pédagogique inspiré par les théories académiques est très répandu y compris en formation à distance. Ceci est principalement la résultante de facteurs culturels privilégiant les démarches de type béhavioristes et de la nature même de la formation à distance qui a recours à la technologie.
C'est l'enseignant qui organise l'apprentissage dans un ordre logique où la mémorisation par l'apprenant joue un rôle essentiel sans négliger le développement du sens critique de ce dernier. En formation à distance le matériel pédagogique mis à disposition de l'apprenant est l'incarnation de l'enseignant.
L'exposé magistral des connaissances qui exclue l'interaction entre l'enseignant et l'apprenant doit être particulièrement convaincant et efficace en formation à distance. La maïeutique socratique éminemment interactive ne porte que sur les connaissances et non sur les processus cognitifs. Les évaluations sont très largement sommatives et portent sur le produit de la performance de l'apprenant.
Ainsi, dans un modèle académique, c'est l'enseignant qui joue le rôle principal car considéré comme possesseur de la connaissance qu'il doit transmettre à l'apprenant. C'est la relation entre l'enseignant et l'apprenant qui est au cœur et détermine le processus d'apprentissage. Le plus souvent, le matériel pédagogique est conçu de manière à reproduire les situations d'apprentissage d'un enseignement en face à face. Enfin, c'est l'enseignant qui contrôle le processus d'apprentissage et évalue les acquisitions de l'apprenant à travers les activités d'apprentissage.

Figure 1 : Les relations entre l'enseignant et l'apprenant dans le modèle académique

 

Le modèle psychocognitif
Le modèle psychocognitif dont les éléments sont suggérés par les théories psychocognitives a pour préoccupation majeure le développement chez l'apprenant des habiletés et savoir-faire cognitifs.
En effet, l'acquisition de connaissances ne peut se réduire à l'enregistrement d'informations nouvelles par l'apprenant. La manière dont ce dernier va structurer ces nouvelles données est un facteur déterminant dans le processus d'apprentissage. Apprendre, c'est aussi savoir repérer ses erreurs conceptuelles et accepter de nouvelles définitions. Bachelard dit "… l'esprit scientifique ne peut se constituer qu'en détruisant l'esprit non scientifique… ". Il est important de noter que les connaissances préalables de l'apprenant ne constituent pas son point de départ mais sont les outils dont il dispose afin d'intégrer de nouvelles informations.
En formation à distance le questionnement de l'apprenant par l'encadrement peut se faire à travers différents médias. L'exemple de la Télé-université est instructif à cet égard. Au début du cours, le tuteur organise un dialogue téléphonique avec l'apprenant afin d'évaluer les stratégies d'apprentissage que ce dernier a choisi. Avant l'étude d'un nouveau concept l'apprenant est invité, par la réalisation d'une activité, à identifier ses connaissances préalables. L'utilisation d'un répertoire tout au long de sa formation permet à l'apprenant de préciser progressivement ses propres définitions et représentation des concepts abordés.
Ces pratiques permettent à l'apprenant de prendre conscience de son bagage préalable de connaissances, de prendre du recul et d'effectuer les ajustements nécessaires. Ce dernier point peut se révéler conflictuel tant il est vrai que les obstacles de nature culturelle ou sociologique nécessitent parfois une véritable " conversion " de l'apprenant.
Ainsi c'est tout au long du processus d'apprentissage que l'apprenant, guidé par le tuteur, doit progressivement modifier ses structures conceptuelles. En formation à distance l'utilisation de médias diversifiés et de manière synergique doit permettre à chaque apprenant de repérer son univers cognitif. L'apprentissage mise sur l'autonomie de l'apprenant. Le tuteur a le rôle d'un facilitateur.
L'interaction est la nature même de l'approche psychocognitive. Le suivi personnalisé de l'apprenant par l'encadrement est impératif. En formation à distance, où l'apprenant et l'enseignant ne sont pas en contact direct, c'est le tuteur qui assure cette interaction avec l'apprenant.
Ainsi, dans une démarche psychocognitive, l'encadrement de l'apprenant est conçu de manière à permettre à l'apprenant d'exercer lui-même le contrôle de son apprentissage sur les plans cognitif, méthodologique, affectif et métacognitif.

Figure 2 : Les étapes de l'approche psychocognitive en formation à distance

 

Les différents acteurs dans un système d'encadrement

L'institution pédagogique
On utilise le terme d'institution pédagogique pour désigner l'organisme dispensateur d'actions de formation à distance. L'institution pédagogique est elle-même constituée de différents éléments.
Le premier d'entre eux est le professeur responsable du cours et l'équipe qu'il s'adjoint pour réaliser le matériel pédagogique. Son objectif est de définir le design pédagogique du cours, de concevoir et de fabriquer l'ensemble des documents médiatisés qui seront à disposition de l'apprenant.
Le deuxième est le tuteur qui va encadrer l'apprenant durant son parcours d'apprentissage. Ses interventions de support sont principalement de type pédagogique mais peuvent également être de type administratif.
Le dernier rassemble les services administratifs auquel l'apprenant s'adresse pour régler les questions d'ordre réglementaire et organisationnel.

Le matériel pédagogique
Le matériel pédagogique, véritable incarnation de l'enseignant en formation à distance, rassemble les documents qui présentent les connaissances à acquérir mais également des activités d'apprentissage où sont illustrées diverses stratégies cognitives et métacognitives. Il doit se suffire à lui-même et être d'un abord en rapport avec les ressources techniques et environnementales de l'apprenant. Il intervient dans l'encadrement de l'apprenant comme support d'apprentissage ; ses fonctions interactives sont limitées à la richesse de son contenu.

L'apprenant
L'apprenant est le bénéficiaire de l'encadrement. Toutefois, il peut par l'accroissement de son autonomie devenir son premier support en mettant en œuvre diverses stratégies qui lui permettront de devenir le véritable acteur de son apprentissage.

Les pairs
Les pairs de l'apprenant peuvent jouer un rôle important dans son encadrement. Au-delà des stratégies liées au travail collaboratif, les pairs en échangeant leurs expériences d'apprentissage permettent une prise de recul et le développement de l'esprit critique. Toutefois, les modalités de ce support peuvent être en contradiction avec les objectifs particuliers de l'apprenant à distance privilégiant ce type d'enseignement pour sa souplesse et sa capacité à individualiser les apprentissages.

Autres acteurs
L'apprenant peut également mettre à contribution d'autres personnes ressources de son entourage. Celles-ci interviennent plus comme support sur différents plans et jouent un rôle particulier sur celui de l'affectif.
Comme nous avons pu le constater, l'apprenant à distance n'est pas seul, et le sentiment d'isolement que certains peuvent ressentir tient plus souvent à une mauvaise identification des ressources à leur disposition et à l'empreinte socio-culturelle que leur a laissé leurs expériences d'apprentissage en face à face. Les formes d'encadrement sont diverses et c'est à chaque apprenant de se les approprier en fonction de ses objectifs et de ses préférences.

Figure 3 : Les différents acteurs et leurs relations dans un système d'encadrement

 

Les différents éléments d'un modèle d'encadrement pédagogique

L'encadrement-programme
Dans " LE GUIDE " de la Télé-université, l'encadrement programme est défini ainsi : " L'encadrement programme constitue une forme de support à l'étudiant où des ressources de la Télé-université sont mises à sa disposition pour lui assurer un cheminement harmonieux dans l'ensemble du programme tant au plan administratif que pédagogique ". L'apprenant peut solliciter les ressources de l'encadrement-programme dans un but d'orientation et de définition des grandes lignes de son projet de formation.

L'encadrement-cours
" La fonction d'encadrement-cours comprend des interventions pédagogiques pratiquées par une personne ressource en vue d'assurer à l'étudiant une démarche d'apprentissage lui permettant d'atteindre les objectifs d'un cours ". C'est le tuteur qui assure l'encadrement-cours. Comme nous l'avons évoqué précédemment, les interventions du tuteur porte sur de nombreux plans. Il est à remarquer que c'est la personne, membre de l'institution pédagogique, qui est le plus souvent en contact avec l'apprenant. Son rôle est donc essentiel au bon déroulement du parcours d'apprentissage de l'apprenant.

Les activités d'apprentissage
A.-J. Deschênes et C. Lebel insistent sur la qualité des activités d'apprentissage proposées aux étudiants comme condition nécessaire à une bonne intégration des connaissances abordées dans les textes à étudier. Ces activités interviennent sur les plans cognitif, socio-affectif motivationnel et métacognitif. Présentes dans le matériel pédagogique, les activités d'apprentissage apportent une aide méthodologique appréciable à l'apprenant. Elles sont suggérées et non obligatoires. Lors de la planification de son parcours d'apprentissage, l'apprenant choisit les activités qu'il souhaite réaliser.

L'encadrement-pairs
Les contacts entre les pairs peuvent être organisés par l'institution pédagogique ou bien laissés à leurs initiatives, on parlera de coopération ou de collaboration. Ce type d'encadrement est souvent dévoreur de temps et ses objectifs cognitifs sont parfois difficiles à identifier. En effet, chaque apprenant poursuit des objectifs qui lui sont propres et qui peuvent ne pas trouver d'écho auprès de ses pairs. Toutefois, l'encadrement-pairs intervient positivement sur les plans affectif et motivationnel par la mise en commun des expériences d'apprentissage vécues par les uns et les autres.

L'apprenant
En formation à distance, l'isolement de l'apprenant le prédestine a jouer un rôle actif sur l'ensemble des éléments constitutifs de son apprentissage et donc de son encadrement. C'est en développant sa réflexion et ses activités métacognitives qu'il sera en capacité de solliciter, juste à temps et juste ce qu'il faut, les ressources d'encadrement qui sont à sa disposition mais aussi de créer ses propres activités d'encadrement. Là encore, le processus d'autonomie dans lequel s'engage l'apprenant est déterminant. Plus celui-ci est dépendant des ressources externes, moins il sera en capacité de s'encadrer, mais aussi, moins il s'encadrera plus il ressentira le besoin de faire appel à des tiers.

 

Dans un modèle les différents éléments qui le composent interagissent les uns sur les autres. C'est l'ensemble de ces relations entre les éléments d'encadrement pédagogique que nous nous proposons d'identifier et de décrire maintenant.

Figure 4 : Les relations entre les différents éléments d'un modèle d'encadrement pédagogique

 

Les relations entre les éléments

Les relations de type " A "
Elles concernent les échanges qui s'effectuent entre les membres de l'institution pédagogique en charge de l'encadrement-programme et l'apprenant. Si ces relations sont bidirectionnelles, le flux d'informations transmises est plus important dans le sens de l'encadrement-programme vers l'apprenant.
Il est possible de modéliser ces relations de la manière suivante : i) suite aux contacts avec les services administratifs que l'apprenant a eu au moment de son inscription, celui-ci est dirigé vers une personne-ressource qui est le plus souvent le responsable du programme de formation et l'acteur principal de l'encadrement-programme ; ii) ce dernier, à partir des éléments d'informations qu'il possède et recueille sur l'apprenant, le conseille et l'oriente dans le programme de formation (explication des méthodes pédagogiques utilisées, présentation et précisions sur le contenu du programme, suggestion de parcours à travers les différents modules etc.) ; iii) Tout au long du parcours d'apprentissage la séquence " ii) " peut être reproduite à la demande de l'apprenant ; iv) des activités d'apprentissages souvent liées à l'approche méthodologique sont animées ou proposées à l'apprenant par le responsable du programme (communications de résultats de recherche en lien avec le domaine d'étude, présentation de stratégies méthodologiques etc.) ; v) des échanges de nature métacognitive sur le parcours d'apprentissage et l'atteinte des objectifs.

Les relations de type " B "
Ces relations s'établissent entre le responsable de l'encadrement-cours, le tuteur, et l'apprenant. Le tuteur est en charge d'accompagner et de faciliter l'atteinte des objectifs pédagogiques de l'apprenant. Il intervient sur différents plans (cognitif, méthodologique, affectif, métacognitif, administratif). Principale personne ressource de l'apprenant, le tuteur doit veiller à développer la capacité d'autonomie de celui-ci. S'il doit, le plus souvent, apporter tout d'abord, un soutien important à l'apprenant, dans un second temps, il doit inciter l'apprenant à identifier ses propres ressources personnelles et l'aider à les développer.
L'efficacité des interventions du tuteur est liée à sa connaissance du rôle de l'encadrement, savoir quand, combien et comment intervenir. De plus, le tuteur, par sa capacité d'empathie pour l'apprenant, est le principal acteur de l'institution pédagogique sur le plan affectif.
Les relations de l'encadrement-cours devraient s'organiser de la manière suivante : i) prise de contact à l'initiative du tuteur (informations individuelle, définition des méthodes de contacts, identification des objectifs pédagogiques à atteindre) ; ii) Tout au long du parcours d'apprentissage et à l'initiative de l'apprenant, séquences de questions/réponses et établissement d'un dialogue sur différents sujets relevant des plans d'intervention du tuteur ; iii) en cas de besoin et à l'initiative du tuteur, contacts destinés à renforcer la motivation et la persévérance de l'apprenant ; iv) en cas de besoin et à l'initiative du tuteur, propositions d'activités destinées à améliorer les stratégies d'apprentissage et l'autonomie de l'apprenant ; v) rétroactions du tuteur sur les travaux effectués par l'apprenant ; vi) négociation de la signification des résultats.

Les relations de type " C "
Les activités d'apprentissage présentes dans le matériel pédagogique sont destinées à permettre un traitement approfondi des matières étudiées par l'apprenant. Il faut comprendre le terme " relations ", dans ce cas de figure, comme la somme des attitudes de l'apprenant vis à vis des activités proposées. C'est bien l'apprenant qui est, ici, le principal acteur dans la mesure où il peut exercer sa liberté de choix. S'il est difficile de proposer une modélisation de ces " relations ", on peut identifier plusieurs types d'attitudes de l'apprenant : i) refus de réaliser les activités (parce qu'elles ne sont pas comprises; mauvaise identification de leurs objectifs, parce qu'elles ne sont pas adaptées à l'apprenant et à ses objectifs etc.) ; ii) réalisation exhaustive des activités proposées (ceci traduit souvent une attitude plus passive et moins autonome de la part de l'apprenant) ; iii) choix et réalisation sélectives parmi les activités proposées (prédilection de l'apprenant pour tel type d'activités, bon exercice de son autonomie etc.) ; iv) création, par l'apprenant, de ses propres activités d'apprentissage (ce qui démontre une bonne capacité méthodologique et une maîtrise raisonnée de son apprentissage).

Les relations de type " D "
Les relations entre pairs peuvent être organisées par l'institution pédagogique ou bien laisser à leur appréciation. Dans ce dernier cas, qui à notre sens relève plus spécifiquement de l'encadrement-pairs, les résultats ne sont signifiants que dans la mesure où ces relations sont planifiées. Nous entendons par là, que leurs objectifs et leurs modalités soient identifiés au préalable, et qu'un système de supervision et d'évaluation soit mis en place. En effet, souvent riche sur le plan affectif, de manière moindre sur les plans méthodologique et métacognitif, ce type d'encadrement est parfois en deçà des promesses formulées sur le plan cognitif.

Les relations de type " W "
L'encadrement-programme et plus particulièrement le responsable du programme entourée d'une équipe d'experts de contenus et de spécialistes des médias conçoit le matériel pédagogique. Comme nous l'avons déjà évoqué, des activités d'apprentissage portant sur les plans cognitif, méthodologique, métacognitif et affectif sont incluses dans ce matériel.
Les objectifs visés par les activités d'apprentissage sont de permettre à l'apprenant de procéder au traitement approfondi d'un sujet, d'améliorer sa méthodologie et d'accroître son autonomie. Selon Lebel et Deschênes , les activités d'apprentissage doivent aussi " favoriser un apprentissage contextualisé… tenir compte des connaissances et des expériences des apprenants… stimuler la motivation des apprenants ".

Les relations de type " X "
Ces relations sont identiques à celles du type " C ". Toutefois la somme de " D " et " X " est concrétisée par des actions d'apprentissage collaboratif. Celles-ci permettent notamment le développement de l'esprit critique des apprenants.

Les relations de type " Y "
Similaires à " B ", ces relations sont également l'occasion de faciliter le travail de groupe. Le tuteur joue alors, un rôle de facilitateur et de superviseur du travail des pairs.

Les relations de type " Z "
Les tuteurs ont un rôle d'interface entre les apprenants et l'équipe conceptrice du cours dont ils peuvent être membres. Ils sont donc en capacité de faire remonter des informations sur les difficultés, les besoins, les souhaits, les propositions des apprenants et influencer les orientations ou la forme du cours lors de sa mise à jour.

 

La conférence électronique (forum), média
et situation de communication pédagogique
Extrait de l'étude de la conférence électronique dans un cours de la Télé-université, décembre 2000.

Introduction
Les situations de communication en formation à distance sont variées et nombreuses. La première particularité de ces situations est qu'elles mettent en communication des participants qui sont éloignés géographiquement. La seconde concerne la forme de ces communications qui est obligatoirement médiatisée. Les médias interviennent donc comme canaux supportant les messages. Nous remarquons que le média, comme canal, n'est pas neutre. En effet, il conditionne la forme des messages qui peut exercer des influences positives ou négatives sur le contenu de la communication. Ainsi, de l'habileté des participants à maîtriser les fonctionnalités du média mais aussi des caractéristiques du média qui autorise plus ou moins d'interactivité, de la place laissée aux médiations humaines et des relations qui s'établissent, dépendent la qualité de la communication.

Parmi les nombreuses situations de communication en formation à distance (matériel pédagogique imprimé, audioconférence, messagerie électronique, conférence électronique, vidéoconférence etc.), nous nous proposons d'étudier la conférence électronique.

Présentation de la conférence électronique
Définitions
Afin de mieux cerner la situation de communication que représente une conférence électronique, il nous semble nécessaire de nous arrêter quelques instants sur les définitions générales de ces deux termes.

Conférence
1° Échange de vues entre deux ou plusieurs personnes.
2° Réunion de représentants de plusieurs États en vue de régler une question d'ordre international.
3° Exposé oral, public, où l'on traite de questions littéraires, religieuses, scientifiques, politiques.

Électronique (adjectif)
1° Qui se rapporte à l'électron.
2° Qui fonctionne selon les principes de l'électronique ; qui utilise les dispositifs électroniques.

Le mot " conférence " fait directement référence à une situation de communication. Traditionnellement, la conférence met en relation, réunit des participants afin qu'ils puissent exprimer leurs points de vues. En diplomatie, la conférence se fixe souvent pour but la rédaction d'une déclaration commune, résultat des échanges et de leur négociation. La conférence est donc, une communication orale, plus ou moins formalisée, allant de l'exposé (" municatif ") à la négociation en passant par une série de questions-réponses (" co-mmunicatives ") .

L'adjectif " électronique " renvoie à la technologie. Ainsi une conférence électronique est un échange entre différentes personnes supporté par une technologie. Nous définirons plus précisément cette technologie dans notre paragraphe consacré au contexte de la situation.

Dans le cas étudié (session d'automne 2000 du cours EDU6002 de la Télé-université du Québec), la conférence électronique à la disposition des étudiants et de leur tutrice se démarque, sur plusieurs aspects, des définitions que nous venons d'évoquer. Si elle recouvre un espace de communication, où l'on retrouve différentes formes d'échanges (exposés, questions, réponses, négociation), ceux-ci ne sont plus oraux mais écrits. De plus, le temps est différent. Du temps réel d'une conférence traditionnelle on passe au temps différé, les échanges se réalisent en mode asynchrone. Enfin, l'objectif de ces échanges est pédagogique et plus particulièrement centré sur l'apprentissage du média mais également sur le processus de construction des connaissances des apprenants sur le thème de la communication en formation à distance.

Nous terminons cet exercice de définition en notant, qu'à notre sens, une distinction doit être faite entre les conférences électroniques et les forums de discussion auxquels on peut participer sur Internet. Le forum est un lieu ouvert où les entrées et sorties des participants sont permanentes. Sa durée n'est pas déterminée, le forum s'éteint faute de participants. Dans le cas d'une conférence électronique, le nombre de participants est initialement fixe, la durée est identifiée, il y a un début et une fin aux échanges.

 

Le contexte

Le cours EDU6002
Le cours EDU6002, dont l'objet est la communication en formation à distance, regroupe, dans sa session d'automne 2000, des étudiants éloignés géographiquement (Québec et France). L'enseignement est diffusé à partir d'un matériel pédagogique imprimé, d'un livre et d'une cassette audio. Par ailleurs, un certain nombre d'activités permettent aux étudiants de se familiariser avec plusieurs médias (audioconférence, conférence électronique, chat).

La conférence électronique du cours EDU6002
La conférence électronique du cours EDU6002 est accessible à partir du site Internet de la Télé-université. Le nombre de participants est circonscrit au gestionnaire, à la tutrice et aux étudiants inscrits à ce cours. L'accès est sécurisé par un identifiant et un mot de passe. L'interface (cf. figure 1) est simple et les fonctions disponibles limitées à : i) l'écriture d'un message ; ii) lire les messages ; iii) supprimer un message (sous réserve que l'on en soit l'auteur) ; iv) démissionner de la conférence ; v) accès à une aide.

Les messages sont présentés sous forme de liste de titres. Les titres sont composés d'un numéro d'ordre, de l'identifiant de l'auteur, d'un objet. Lorsque le message est un commentaire, ceci est précisé dans le titre ainsi que le numéro du message qui est commenté. Pour accéder au contenu d'un message il suffit de faire un clic de souris sur son titre. Dans le cas où le message a été commenté, une mention le signale et par clic de souris sur celle-ci on accède au commentaire. Lorsque de nouveaux messages ont été déposés, une mention nous l'indique. Le contenu des messages est exclusivement textuel sans possibilité d'enrichissement typographique ni d'insertion de tableaux, de schémas ou d'images. Il est possible d'imprimer les messages ou d'en copier le contenu vers un traitement de texte.

Quelques éléments quantitatifs
Si nous ne concevons pas cette étude comme une analyse quantitative qui constituerait plus l'objet d'une recherche, pour laquelle, les données de la conférence électronique étudiée seraient insuffisantes, il nous semble intéressant de préciser le volume des échanges afin de donner quelques clés contextuelles supplémentaires.

Dans le " Tableau 1 " que nous présentons ci-après , nous établissons une distinction entre les contributions et les commentaires. Les premières sont les messages déposés par les participants et qui sont susceptibles d'engager le dialogue, les seconds sont des messages déposés en réponse à des contributions. Ainsi, les commentaires expriment le niveau de " co-mmunication " et les contributions relèvent plus de la " munication ". Nous détaillons le nombre des messages par semaine.

Par ailleurs, nous proposons le " Tableau 2 " qui concerne spécifiquement les commentaires afin de quantifier les échanges qui ont eu lieu entre les différents participants et qui sont susceptibles de traduire des tentatives de travail collaboratif. Ainsi, le nombre de commentaires émanant d'un étudiant vers un autre étudiant apparaît dans une cellule en bleu.

Le gestionnaire est la personne qui assure l'existence matérielle de la conférence. Nous préservons l'anonymat des étudiants en leur donnant arbitrairement un numéro (de 1 à 5).

Tableau 1 : Relevés quantitatifs de la conférence électronique du cours EDU6002

Tableau 2 : Flux des commentaires entre les participants de la conférence électronique du cours EDU6002

 

Les caractéristiques de la conférence électronique

Le langage
Le langage ou " système de symboles " utilisé dans la conférence électronique se limite à des textes écrits en langue française. Comme nous l'avons déjà souligné, les contraintes technologiques permettent uniquement la saisie de texte au format ASCII (American Standard Code for Information Interchange) sans enrichissement typographique. De fait, si la conférence est basée sur la technologie d'Internet, il n'est pas possible de tirer partie du langage HTML (HyperText Language Markup). La création de liens hypertextes est donc interdite et la forme graphique des messages écrits se rapproche plus de celle des textes dactylographiés que de celle issue d'un traitement de texte.

Le mode de communication
Le mode de communication de la conférence électronique est asynchrone. C'est à dire que dans un premier temps, l'émetteur dépose son message, puis le ou les récepteurs en prennent connaissance et éventuellement rédigent des commentaires. L'émetteur n'est donc jamais certain que ses contributions atteignent réellement les récepteurs en l'absence de commentaires. La contribution ressemble à une " bouteille à la mer ". Ainsi, la " munication " ne se transforme en " co-mmunication " que si les participants en ont la volonté. De plus, l'absence de communication non verbale ainsi que de signaux phatiques ne permet pas de pallier aux inconvénients du mode asynchrone. Certains avantages existent pourtant. Ils sont principalement liés à la forme écrite des messages (pas de limitation quantitative, structuration du propos, choix des termes, permanence du message, disponibilité du contenu à tout moment). L'émetteur, par son acte d'écriture, exprime ses propres représentions qu'il reconstruit par l'intermédiaire des signes qu'il utilise (lettres, mots, phrases, syntaxe). Il procède donc autant à une " auto-communication " de type métacognitif qu'à une communication à contenu informationnel.

Les relations établies par ce mode de communication sont donc de deux types : d'émetteur à émetteur et d'émetteur à récepteur. La première a des influences non négligeables sur les plans cognitif, métacognitif et affectif. L'émetteur tout en exprimant ses connaissances du sujet fait également le point sur celles-ci. De cette activité métacognitive, il peut tirer un certain nombre d'informations sur lui-même en tant qu'émetteur et apprenant qui feront écho sur son estime de lui-même.

La relation entre émetteur et récepteur est tout d'abord volontariste et peut donc ne pas s'établir explicitement. Il est vrai que l'absence de rétroaction du récepteur est aussi signifiante sur le plan communicationnel. Toutefois, la relation explicite entre deux interlocuteurs ne s'établit que par l'échange de messages écrits. La perception de l'autre est donc restreinte et restrictive. Chacun compose ses représentations de l'autre, ses " cartes " , à partir des messages, ou de leur absence, qu'il réceptionne. Or, l'expression écrite traduit, comme nous l'avons souligné, une auto-représentation que l'on peut qualifier " d'avatar ". Les relations établies lors d'une conférence électronique le sont plus entre les " avatars " des participants qu'entre les individus eux-mêmes. Pourtant, la relative virtualité de ces relations ne constitue pas un obstacle à leur richesse et à leur complexité. En effet, chacun, à travers sa communication, souhaite atteindre des buts relationnels dont la trace se retrouve dans ses messages.

La conférence électronique permet donc bien l'établissement des deux niveaux d'une communication : la relation et le contenu. Ces deux niveaux interagissent et la reconnaissance du cadre de la relation influence l'expression du contenu.

L'interactivité
Nous nous basons sur la définition de l'interactivité du " Petit Larousse ", reprise par F. Demaizière et C. Dubuisson. Il s'agit donc d'examiner les échanges permis entre un participant à une conférence électronique et ce média. Selon ces auteures, l'interactivité peut être décomposée en deux niveaux : l'interactivité fonctionnelle et l'interactivité intentionnelle.

Nous avons déjà évoqué l'interactivité fonctionnelle à travers l'identification des fonctions de la conférence électronique. Nous notons que celle-ci ne peut exister sans un minimum de connaissances et d'habiletés préalables de la part de l'utilisateur (maîtrise des micro-ordinateurs, connaissance de la navigation sur Internet). L'interactivité fonctionnelle permise est d'un niveau qualitatif que nous qualifierons de " basique " permettant de répondre aux besoins élémentaires à l'existence de la conférence électronique (inscrire et lire des messages).

L'interactivité intentionnelle relève des choix qui ont été opérés par les concepteurs de la conférence électronique. Ceux-ci ne nous sont pas connus, seul le gestionnaire du système est " visible ". Nous pouvons, néanmoins, supposer que les concepteurs ont mis en place les solutions techniques traduisant les intentions de l'institution pédagogique. Quelques indices fonctionnels nous donnent des indications sur l'interactivité intentionnelle. C'est le cas, par exemple, du menu " Aide " qui traduit le souci des concepteurs de rendre accessible l'interactivité fonctionnelle à tous les participants. De même, le menu " Démissionner " indique que les concepteurs souhaitent que la participation à la conférence électronique soit volontaire et ménage l'autonomie décisionnelle de l'apprenant.

L'interaction
Concernant le définition de l'interaction, nous nous basons sur les mêmes références que pour l'interactivité. Par interaction nous entendons donc les influences réciproques des participants à la conférence électronique. Nous avons précédemment fait la distinction entre les contributions et les commentaires. Nous retrouverons les principales manifestations d'interaction dans ces derniers. Il nous faut néanmoins remarquer que ces interactions s'établissent par l'intermédiaire des messages échangés, qu'elles interviennent tant sur le contenu que sur la relation de la communication et quelles provoquent des résonances sur les plans cognitif, métacognitif et affectif.

La rétroaction
La rétroaction peut être définie, comme la rapidité et le type de réponse que permet le média. La rapidité de réponse du média à l'activation de ses différentes fonctions par l'utilisateur est déterminée par les caractéristiques techniques d'Internet. Nous remarquons qu'elle dépend plus de la " bande passante " disponible sur le réseau que de l'équipement matériel de l'utilisateur. Nous évaluons cette rapidité normale par rapport à l'utilisation d'Internet. Le média n'émet aucun message autre que ceux liés à ces fonctionnalités (ouverture de fenêtre de saisie, accès au texte du message etc.). La rapidité de l'interactivité fonctionnelle est donc normale au regard des fonctions qui sont " basiques ". La rapidité des interactions qui sont soumises au mode asynchrone dépend, elle, de la disponibilité et de la volonté des participants.

L'accessibilité
L'accessibilité de la conférence électronique est conditionnée par l'utilisation d'un micro-ordinateur connecté à Internet. Si le coût de cet équipement n'est pas négligeable pour l'apprenant, il n'est pas uniquement imputable, dans le cadre d'une formation à distance, à l'utilisation de la conférence électronique. Nous le qualifierons donc de marginal. Il reste que son montant varie en fonction du temps passé connecté à la conférence électronique. La disponibilité de la conférence est permanente pour la durée de son existence.

La convivialité
La conférence électronique est très conviviale sur le plan fonctionnel. En effet, le nombre limité de fonctions à disposition de l'usager ainsi que l'interface graphique sobre rendent son utilisation aisée.

Sur le plan relationnel, sa convivialité est inversement proportionnelle à sa sobriété fonctionnelle. Nous y voyons là un parti pris technique et peut-être l'expression d'une intention des concepteurs préférant la simplicité maîtrisée et opérationnelle à une complexité plus difficile à s'approprier. Il est clair que les connexions à la conférence électronique sont seulement motivées par son objet et non sa forme.

Les activités d'apprentissage et d'encadrement
La conférence électronique est le support de situations particulières d'apprentissage et d'encadrement. Tout d'abord, l'apprenant à partir des messages auxquels il a accès dans la conférence électronique peut définir les activités qui lui permettront de construire son apprentissage et ses connaissances à partir du contenu. Les stratégies qu'il peut utiliser sont celles que l'on met traditionnellement en œuvre lors de l'étude d'un texte imprimé. En effet, les fonctions limitées de la conférence électronique ne permettent pas un travail approfondi directement sur écran. La récupération du texte dans un logiciel de traitement de texte ou son impression sont les stratégies préliminaires à adopter avant de procéder à une lecture de fond. L'intérêt principal de la conférence électronique, sur le plan des stratégies d'apprentissage, réside donc dans ses rôles d'éditeur et de distributeur de contenu.

Par ailleurs, le tuteur d'un groupe d'apprenants utilisateurs d'une conférence électronique peut développer de nouvelles stratégies d'encadrement. En effet, ses rétroactions mises à la disposition de tous sous forme de commentaires sont susceptibles d'orienter ou de susciter le travail collaboratif entre pairs. En lieu et place d'un encadrement personnalisé qui se manifeste, le plus souvent, par l'usage de la messagerie électronique ou du téléphone, le tuteur peut adopter un rôle d'animateur/facilitateur au service du groupe. Là encore, les modifications liées à l'encadrement des apprenants sont déterminées par les fonctions d'édition et de distribution de la conférence électronique.

Pourtant, la conférence électronique ne se borne pas à communiquer des contenus. Comme dans toute situation de communication un deuxième niveau, celui des relations établies, est indissociable de celui de la transmission des informations. A cet égard, nous constatons, que la conférence électronique permet l'établissement de relations multipoints dont la description ne peut se résumer en une compilation des relations d'un individu à l'autre. L'espace de communication créé par une conférence électronique se structure de manière complexe puisque chaque émetteur et récepteur apporte sa pierre à l'édifice commun. Les relations établies ne sont donc plus seulement celles d'un sujet envers un autre sujet mais de manière synergique, entre celles de plusieurs sujets vers un groupe de sujets. On peut certainement évaluer le degré de réussite d'une conférence électronique, comme situation de communication, en fonction de la création de l'identité du groupe et du sentiment d'appartenance de chacun à ce groupe. Dans le cas d'une conférence électronique à but pédagogique, cette évaluation peut se baser sur l'analyse des comportements, d'entraide et de travail collaboratif entre les pairs, qui émergent.

Ainsi, la capacité de la conférence électronique à offrir en partage des contenus, couplée à l'établissement de relations complexes entre les participants, créatrices de l'identité du groupe, constitue l'originalité principale de ce média en matière d'activités d'apprentissage et d'encadrement.

 

Les éléments de la conférence électronique
Nous évoquerons rapidement, ci-après, les différents éléments constitutifs de la conférence électronique. Certains de leurs aspects ayant déjà été évoqués dans notre description des caractéristiques de ce média, nous nous limiterons à l'essentiel.

Les messages
Nous avons introduit une distinction entre les messages correspondant à des contributions et ceux à des commentaires. Dans le cadre de la conférence électronique étudiée, le contenu de ces messages est en rapport direct avec la situation d'apprentissage à laquelle sont confrontés les apprenants. Ainsi, nous pouvons distinguer des contenus à portée cognitive, méthodologique, métacognitive ou encore affective. La ligne directrice de ces messages étant le sujet du cours EDU6002 : la communication pédagogique en formation à distance.

Les émetteurs/récepteurs
Plus que d'émetteurs et de récepteurs nous préférons adopter la terminologie d'émétteur/récepteurs. En effet, chacun à leur tour les participants émettent et réceptionnent des messages. De plus, et ce malgré le mode asynchrone de la conférence électronique, il nous semble plus juste de considérer que les participants tout en émettant sont récepteurs (ne serait-ce que sur l'aspect relationnel de la communication) et qu'en réceptionnant, ils se préparent à émettre. Nous reprendrons, donc, la codification employée par Roger Desmet : i) " REM " pour participant à une conférence électronique ; ii) " Rem " pour participant réceptionnant et se préparant à émettre, iii) " rEM " pour participant émetteur attentif aux rétroactions des autres participants. Les participants, les " REM ", de la conférence électronique du cours EDU6002 sont les étudiants inscrits à ce cours, leur tutrice et le gestionnaire du média.

Les bruits
Les bruits sont définies comme les contraintes liées à la transmission du message. De ce point de vue, les principaux bruits de la conférence électronique sont liés à ces caractéristiques : mode asynchrone, messages écrits limités au texte non enrichi typographiquement. Les autres bruits sont définis par les conditions d'accessibilité du média : connaissances préalables de la micro-informatique et d'Internet, difficultés éventuelles liées à l'établissement de la connexion.

Les relations
Les relations qui s'établissent entre les " REM " de la conférence électronique sont variées et complexes. Elle s'apparentent plus à une vision systémique que linéaire. Elles sont caractérisées par le fait qu'un " REM " passe successivement de l'état de " Rem " à celui de " rEM ".

Les interactions
Les interactions permises par la conférence électronique sont d'autant plus riches qu'au départ cette situation de communication s'établit d'égal à égal. Ce sont les échanges successifs et les positionnements de chacun des " REM " qui sont susceptibles de faire évoluer les relations initiales vers un nouveau schéma où certains participants peuvent se révéler plus " moteurs " et d'autres plus " passifs ". Nous avons souligné également que ces interactions révélaient plus les " avatars " des " REM " que les participants eux-mêmes.

Les réactions affectives
Les réactions affectives en face de la conférence électronique sont extrêmement variées et dépendent des personnalités des participants. Certains peuvent être inhibés par ce média qu'ils ne connaissent pas, à l'opposé, d'autres peuvent s'en servir pour poursuivre des buts différents que ceux proposés à l'origine. Ces réactions affectives sont déterminantes sur la réalité du groupe et les émergences qui en résultent.

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